Cette fresque est extraite de L’affaire Tournesol (1956), le 18e album des Aventures de Tintin. Tintin, son chien Milou et le capitaine Haddock se précipitent dans l’escalier de secours d’un hôtel dans le pays fictif de la Bordurie. Ils volent à la rescousse du Professeur Tournesol qui a été enlevé pour son invention d’une machine destructrice très puissante que s’arrachent deux États totalitaires en concurrence. Sur fond de Guerre Froide, l’intrigue est un long suspens rempli d’espionnage mais aussi de gags.
Créé par Georges Remi, alias Hergé, Tintin est un jeune reporter qui apparaît en 1929 dans Le Petit Vingtième, le supplément jeunesse du journal catholique belge Le Vingtième Siècle. Considéré comme le père de la bande dessinée franco-belge, Hergé connaît un succès international avec Tintin. En 1946, il devient directeur artistique du Journal de Tintin fondé par Raymond Leblanc, puis il crée son propre studio.
Hergé vivait à Bruxelles et s’est souvent inspiré de cette ville pour créer les décors de Tintin. On retrouve par exemple dans son œuvre le Parc de Bruxelles (Le Sceptre d’Ottokar, 1939), la place du Jeu de Balle (Le secret de la licorne, 1943), l’Hôtel Métropole de la place De Brouckère (Les Sept boules de cristal, 1948)… Pour ses premiers récits, Hergé se documente à partir de lectures, de films et dans les musées. Ce n’est qu’à partir de L’affaire Tournesol (1956) qu’il commence à se rendre dans certains pays qu’il décrit afin de les représenter au mieux.
Proche du scoutisme et des milieux catholiques conservateurs, Hergé a été critiqué pour son paternalisme et les stéréotypes utilisés dans les représentations de populations d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique. L’histoire qui a probablement le plus cristallisé ces critiques est Tintin au Congo (1931), réalisée à la demande de l’abbé Norbert Wallez pour promouvoir l’entreprise coloniale belge. S’inspirant des collections du musée royal de l’Afrique centrale, Hergé a représenté les Congolais en utilisant divers codes racistes qui circulaient en Belgique à cette époque. Dès 1946, il remplace certains dialogues paternalistes et supprime quelques références explicitement racistes (comme la réplique de Tintin : « Craintif comme tous ceux de sa race, mon pygmée aura donné l’alarme »).
Dans les années 1960, alors que de nombreux pays africains déclarent leur indépendance, Hergé n’est plus très populaire dans les librairies. Dans un article pionnier publié en 1962 au journal Jeune Afrique, la journaliste Gabrielle Rolin décrit les stéréotypes racistes présents dans l’œuvre d’Hergé. Celui-ci prépare quelques années plus tard une série d’entretiens avec Numa Jadoul qui sont publiés en 1975 sous le titre Tintin et moi. Hergé y reconnaît une vision paternaliste dans ces premiers albums, dans un contexte marqué par le colonialisme et alors qu’il est lui-même en début de carrière.
Malgré ces critiques, Les aventures de Tintin connaissent un succès retentissant. Hergé meurt en 1983. En 2011, le réalisateur Steven Spielberg réalise l’adaptation cinématographique de l’album Le secret de la licorne.